Le Zaza Club et sa biodiversité nocturne
Nossa, nossa
Assim você me mata
Ai se eu te pego
Ai ai se eu te pego
Le portugais n’est pas une langue officielle à Madagascar mais « ici » on connaît très bien les paroles de la chanson Ai se eu te pego de Michel Teló que le DJ vient de lancer. « Ici » c’est le Zaza Club, endroit qui se fond dans le décor du bord de mer de Tuléar. Dans les parages, il y a une pharmacie, la banque centrale, les locaux de l’Etat major de la région militaire et de la WWF. Zaza Club est bien situé.
C’est vendredi, une petite pause du côté de mes responsabilités estudiantines s’annonce. Les examens sont terminés. Et cette année, c’est sûr que les stylos rouges de mes profs vont décapiter mes feuilles de copie et moi avec. Comme ce n’est pas bien drôle de se faire à l’idée qu’on va nous arracher la tête, il faut trouver un moyen pour la garder (la tête). Donc ce soir, c’est Zaza Club.
Photo by No comment
Je vous ai déjà peut-être parlé de cet endroit populaire une fois. Et pour tout vous dire, on n’y gagne pas des points en QI mais pour faire grimper son moral, ça peut marcher.
Voici 3 techniques pour booster son moral au Zaza Club :
Technique 1 : Rejoindre la piste et danser comme un dégenté
Si c’était un match de basket, je dirais que cette technique-là, je ne la pratique que durant le premier quart-temps. J’avoue que je suis un piètre danseur, voilà pourquoi j’entre vite en 2ème quart-temps avec la technique 2.
Technique 2 : Rester sur le banc des remplaçants et se souler comme un trou
Celle-là aussi ne dure pas plus longtemps que l’étape précédente. Je n’étais peut-être pas présent quand le Créateur a partagé le don de résistance à l’alcool mais avec un prix qui avoisine le quart du SMIC étudiant, il faut dire qu’un THB ou un Skol coûte un peu la peau des fesses. Au lieu de s’enivrer, je m’achète alors une bière qui restera à moitié vide (ou à moitié pleine) toute la soirée pour le décor.
Technique 3 : Rester sur le banc des remplaçants et faire comme un jury de téléréalité
C’est la technique 3 qui occupe la majeure partie du temps. La piste est très représentative de toutes les danses de la population cosmopolite tuléaroise. Et Dieu sait qu’on sait trop bien danser « ici ». Je mettrais même ma main à couper qu’un chorégraphe est planqué, tous les soirs, quelque part, étudiant à la loupe les agitations d’un mec moyennement sobre qui a quitté le banc des remplaçants en se disant que l’heure de la « dégente-time » a sonné.
Le DJ, lui s’est trompé en refusant de breveter sa playlist à l’Office MAlgache de la Propriété Intellectuelle (OMAPI). Désormais, dans toutes les soirées de Tuléar, on entendra, comme par hasard, les chansons qu’il a passées en boîte, dans un ordre différent.
Au 3ème quart-temps, je ne suis pas le seul jury qui compose la salle. Des hommes et des femmes, sérieux, verre à la main, sont aussi assis et ont les grands yeux rivés vers la piste. Ensemble, on aurait pu rédiger une encyclopédie : « Wikipédia comportemental et artistique en boîte ». La nuit de folie a commencé, chaque chanson est un karaoké collectif accompagné de danse free-style. Tout le monde cohabite et sue. J’ai devant moi « American Idol » version malgache.
C’était vendredi. Sous les lumières mystérieuses, deux copines très complices et très sensuelles dansent en se regardant les yeux dans les yeux. J’ai deviné qu’elles ne diraient pas non si quelqu’un sollicitait leur service pour le prix d’un. Elles sont parties quand le « Tsatotsatoha » de Tence Mena a résonné. C’est un peu genre dirty dance. Des couples dansaient ça si bien, des solitaires aussi d’ailleurs. A la manière dont ils se trémoussaient et elles de bouger leur popotin, il était clair que les moins de 18 ans ne seraient jamais admis en boîte. Jamais, jamais.
Si vous ne connaissez pas encore la fameuse Tence Mena 🙂
Tout d’un coup les voiles du mystère laissent place à la lumière nette. Les clubbers rejoignent leur banc. Certains s’assoient, les bras croisés autour de la piste quand d’autres, éloignés s’en approchent, tous contents comme des enfants dans une cour de récré.
Je me demandais ce qui allait se passer quand l’animateur avance et répond à ma question : « Ce soir mesdames et messieurs, concours d’orange sur le front !! ». Chaque couple participant devait garder front contre front une orange, tout en dansant sur des rythmes pas possibles, aussi longtemps qu’il pouvait tenir. Des bravos et des billets de banque fusaient pour les binômes performants.
Quel moyen génial de rendre les soirées ludiques et donner un petit break à toute cette foule en sueur, dis-je. On nous apprend que samedi c’est le concours « Tsatotsatoha » de Tence Mena et dimanche « Tsapiky en couple » (ça se danse en couple ça ?). Samedi, dimanche, je ne pourrais pas.
Mes amis noctambules ne tardent pas à se réchauffer, la chanson « Rebôna » (comment vous expliquer ça…) vient de remplir la salle d’adeptes de Tsapiky.
C’est la fin du 3ème quart-temps pour moi, je dois rentrer : mes genoux me font mal… heureusement que l’alcootest n’existe pas encore à Tuléar… j’en avais un peu marre de jouer aux jurys.
A la sortie, un vazaha et une inconnue et que sais-je encore allaient débuter un autre match à 4 quart-temps sans compter les prolongations. (Technique 4???)
« C’est où la discothèque Zaza Club ? » demandez ça à un tuléarois et on vous montrera gentiment où c’est.
Ah ! Le Zaza Club, sa machine à remonter le moral et sa biodiversité nocturne. Tiens, ça pourrait faire un thème passionnant pour ma licence ça…mais je doute que les jurys (les vrais jurys) soient du même avis… En pensant au drôle de stage que peut engendrer un sujet pareil, la chanson de Michel Teló vient de passer pour la troisième fois. C’était déjà samedi.
Delícia, delícia
Assim você me mata
Ai se eu te pego
Ai ai se eu te pego
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